Barcelona
Questions de vie

Pour quoi tu te bats ?

Tu le sais toi ? Pourquoi un jour tu te lèves et, sans savoir d’où ça vient, tu décides de faire une action particulière qui te tient à cœur ? Pourquoi tu as la sensation que ton travail n’a pas de sens et qu’il te manque ce petit quelque chose en plus ? Pourquoi tu as ce truc qui vibre à l’intérieur de toi quand tu parles d’un sujet particulier ?

Difficile de répondre à toutes ces questions. Il y a mille et une raisons possibles à tout cela. La convergence des émotions mêlées à une maturité (ou non), des envies refoulées voire un besoin d’exister, de se sentir utile. D’ailleurs est-ce que l’on doit tous et toutes se battre pour quelque chose ou cela fait encore partie des injonctions de la société dans laquelle tu dois faire pour exister ? Est-ce que si je deviens militante demain, je me sentirais plus légitime à être parce que je fais ?

Je cherche encore moi-même les réponses à ces questions et à toutes leurs petites sœurs. Je ne sais pas bien où me situer dans tout cela. J’ai des valeurs, des convictions profondes, je me connais de mieux en mieux et j’aime la personne que je deviens. Pourtant, un petit bout de moi continue de se sentir en décalage avec ce qui m’entoure, et mon métier par exemple (c’est bien ce que je fais, mais je ne sauve pas des vies, alors qu’elle est ma valeur ajoutée dans ce monde ?).  Est-ce normal, une question purement générationnelle ou crise existentielle ? Je ne suis pas certaine de la dernière option, car je me sens bien dans mes baskets, mais je ne cesse de me demander comment je pourrais faire mieux, qu’elle pourrait être ma part « un peu plus grosse » du colibri.

Je suis aussi de plus en plus admirative de celles et ceux qui ne craignent pas de porter leur voix pour se faire entendre. D’avoir le courage de leurs convictions, d’oser faire parce que cela fait du sens pour eux et d’orienter leur vie en fonction de cela. Je pense par exemple à Victoria Guillomon, partie au bout du monde sans avion pour explorer la question de l’eau (cliquez ici), la YouTubeuse Iznowgood qui délivre tous ses conseils sur la mode éthique et responsable (cliquez ici) ou bien encore toutes ces autres personnes qui militent pour la cause animale, les personnes dans le besoin, qui font des maraudes le soir pour les sans-abris ou qui agissent pour l’océan contre vents et marées.

Comment se place-t-on, nous « les autres », face à cela ? Est-ce que l’on doit se placer ? Est-ce qu’il faut toujours militer avec grand bruit ou le militantisme silencieux est aussi bon ? Est-ce que je suis quand même une bonne personne si je ne le fais pas comme ça, de cette manière-là, à la fois si symbolique et catégorisé ? Est-ce qu’il y a une injonction maintenant de devoir se battre pour une cause du fait que notre monde part à la dérive, ou est-ce que se battre pour son petit monde, ses proches, ce qui nous touche au quotidien est déjà suffisant ?

Mon cerveau s’emballe en écrivant ses lignes et ressent toutes les contradictions de chaque situation : envoyer valser son job, car on n’y trouve pas un sens suffisamment profond directement tangible avant de réaliser que ce sentiment nait d’une constante remise en question, car les standards que l’on s’impose sont plus élevés que la moyenne ; rêver de liberté totale pour organiser son emploi du temps alors qu’une discipline routinière est nécessaire pour la réussite de tout projet, quel qu’il soit ;  démarrer une activité qui a « du sens » en se disant que les échecs ou les choses hors de contrôle seront justifiés alors qu’en réalité elles nous écraseront plus, car on sera au-devant de la scène de notre manque de contrôle. 

Et dans ces moments de doute, j’entends la voix des hommes de ma vie raisonner pour me faire ralentir. D’un côté, celle de mon futur mari, qui dans toute son honnêteté franche et directe, me rappelle que la vie est faite de choix, et que faire des choix c’est renoncer. C’est aussi accepter qui l’on est et que peu importe ce qu’on fait, en accord avec ses standards éthiques parfois beaucoup plus élevés. C’est accepté que, lorsqu’on est une personne entière, tout ce qu’on entreprend est décuplé par la passion, la remise en question et l’empathie du cœur qu’on n’efface pas. C’est apprendre à lâcher prise. De l’autre, celle de mon père, implacable et identique depuis toute petite comme un prophète : « Tu dois apprendre à gérer tes priorités » ou bien encore « tu ne peux pas être partout, tout le temps, avec la même qualité de réponse ».  C’est savoir garder le contrôle sur ce qui est de notre responsabilité

C’est peut-être cela au final qui me touche le plus dans ce monde en perdition : les gens qui prennent leurs responsabilités. Ces personnes qui n’ont pas peur de faire des choix, quels qu’ils soient, bons ou mauvais, censés ou non, en adéquation avec mes croyances ou non. Alors oui, certains sont médiatisés et cet accès à l’information rapide et instantané peut créer en parallèle un sentiment de culpabilité chez l’autre « de ne pas faire assez », et donc de « ne pas être assez », injonction à une nouvelle performance sociale, après une performance économique en bout de course. Mais lorsqu’on prend le temps de se poser, de discuter et d’analyser ce qui fait naitre en nous ce sentiment mitigé, on se rend compte que l’on est aussi responsable de ce que l’on s’inflige, de ce que l’on croit et surtout de ce que l’on veut vivre.

Pourquoi je me bats ? Pour plein de choses en réalité. Aussi insignifiantes puissent-elles être au regard des autres, elles existent bel et bien dans mon monde, et je m’efforce chaque jour de m’assurer que chaque pas est en accord avec ce que je crois être juste. Et c’est déjà bien.  

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